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11 juin 2014 3 11 /06 /juin /2014 13:04

On a déjà beaucoup écrit sur une réforme territoriale dénaturée par le fait du prince et le jeu d’influence des barons du PS. Lorsque le compromis l’emporte sur le principe de réalité et l’exigence de justice, il ne faut pas attendre autre chose qu’un produit hasardeux qui ne satisfait personne.
Avec quelle impatience les Bretons attendaient cette réforme que le Président Mitterrand  leur avait promise ! Ils avaient voté en masse pour le nouveau pouvoir espérant, qu’un beau jour, la raison et la politique -dans ce qu’elle peut avoir de plus noble- finiraient par remettre la Loire-Atlantique en Bretagne et la démocratie sur ses bases. Et même irais-je jusqu’à dire : qu’importe le fait du prince s’il ne tient qu’à forcer la main du Président Auxiette pour mettre un terme à sa gabegie visant à rendre crédible l’illusion des « pays de la Loire » et à inculquer à nos enfants de Loire-Atlantique qu’ils ne sont pas bretons mais « ligériens ».
 Un bon coup de fouet démocratique pour tenir compte des hommes  et réconcilier le peuple et la politique, voilà ce qu’ils attendaient. Car il faut-il être aveugle pour ne pas réaliser que les partisans de la région des « Pays de la loire » ne rassemblent que ses obligés de tous poils, outre ceux qui, par crainte ou idéologie, vouent une haine viscérale à l’identité bretonne. Le besoin ou la peur, soit une forme singulière de corruption qui ne dit jamais son nom.
La stupéfaction et la colère sont à la hauteur des espérances. Car au nom de la décentralisation, on redessine les cartes à partir d’un bureau parisien, sans la moindre étude et prise en compte de l’humain. La France est malade de sa gouvernance et de son élite repliée sur elle-même au point de cadenasser le peuple au sein de limites territoriales où il n’a que faire. Ceux qui ne jurent que par la démocratie participative sont les premiers à refuser aux habitants de Loire-Atlantique le droit d’être consulté sur ce qui ne concerne qu’eux : leur appartenance régionale.
La Bretagne, fière de son identité ouverte sur le monde, reçoit le mépris de ceux qui soutiennent que la réunification de son territoire « est un danger pour la France ». La réunification de la Normandie n’émeut personne mais la nôtre heurterait les bonnes consciences républicaines. Faut-il être tourmenté à l’idée de perdre son fief ou avoir peur de l’altérité bretonne à un point maladif pour dire des choses pareilles? J’avais raison lorsque j’écrivais dans « la désunion française » que la France trouve son unité contre l’Autre mais qu’il faudrait peut-être revoir les choses le jour où le pouvoir sera capable d’oser la Bretagne réunifiée.
Nous assistons à la fin d’un monde où la puissance publique est libre de tout faire. La précipitation de la réforme territoriale doit beaucoup à la nécessité de convaincre l’Union européenne et tous les créanciers de Paris que la France est à même de réformer ses structures lorsque son économie est au plus mal et ses finances désastreuses. Et comme on ne peut toucher à l’Etat hypertrophié sans que le système ne s’effondre, il ne tient qu’à redécouper les régions à la-va-comme-je-te-pousse.
Or la réforme territoriale n’apportera aucune amélioration budgétaire. Les habitants de Loire-Atlantique savent bien qu’une région artificielle dépensera d’autant plus d’argent que son assise est faible. Elle aggrave encore la rupture entre les élites et le peuple qui se détourne de cette démocratie-là et lorgne vers les extrêmes. Avec un tel déficit d’unité, jamais la France ne parviendra à effectuer les réformes qu’impose son insertion dans la mondialisation. Et le pire est sans doute à venir… Condamnés au dilemme entre marginalisation à quatre départements et disparition grand-ouest, les Bretons mesurent combien le pouvoir les rejette. C’est une faute politique majeure, car le fossé s’élargit dangereusement entre la France et la Bretagne. Dans le contexte d’une réforme territoriale qui s’annonce mouvementée, les Bretons sauront rappeler à la France qu’elle n’a d’autre choix que d’oser la Bretagne.

 

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